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Interview d’un maître d’éducation physique à l’école primaire

Nous avons eu la chance de pouvoir poser quelques questions à un Maître d’éducation physique à l’école primaire, Benjamin Auvergne, qui enseigne depuis maintenant 15 ans. Il a pratiqué un grand nombre de sports différents avec une prédominance dans les sports de raquette, de glisse été comme hiver et les arts martiaux.

Pour lui le sport est une discipline qui oblige les élèves à vivre un grand nombre d’émotions qu’elles soient positives ou négatives. Ils doivent surmonter des « épreuves » pendant une leçon et cet aspect apprend à l’élève à se forger un physique et un mental fort pour réussir. L’articulation entre ces deux champs donne une dimension particulière à l’enseignement du sport et ainsi lui donne une place à part au regard des autres disciplines scolaires.

Quels sont les bienfaits de la pratique du sport à l’école et que donner comme conseil aux jeunes enseignants ?

Benjamin est convaincu qu’une pratique du sport bien dirigée et adaptée à la tranche d’âge des élèves, permet non seulement de faire bouger les enfants et ainsi palier au manque de mouvements qui caractérise de plus en plus notre société actuelle, mais également de leur donner des outils pour « supporter » le travail effectué en classe.

Faute de temps, nous sous-estimons les bienfaits du sport dans le cadre scolaire, mais il ne faut pas oublier d’utiliser le sport pour renforcer les notions vues en cours ou pour introduire des notions en mouvement afin de rendre l’apprentissage plus aisé pendant les leçons en salle de classe. Dans l’horaire scolaire, les élèves passent 1/5ème du temps à bouger (salle de sport et récréation); le reste du temps ils sont en classe à leur bureau.

Un conseil pour les nouveaux enseignants : faire bouger un maximum les élèves pendant une leçon et les faire jouer le plus possible. La leçon doit passer par le jeu dans tous les sports et c’est notre travail d’intégrer dans les jeux les notions que nous aimerions qu’ils acquièrent !

Une séance de sport se déroule sur un canevas assez simple : échauffement, partie principale du cours, retour au calme.Dans l’échauffement, je mets en place des routines principalement sur la course et la condition physique et une partie liée à la suite de la leçon. La partie principale dépend du sport choisi et sera divisée en exercices variés et des jeux liés à l’activité. Enfin le retour au calme peut-être un jeu ou un moment de respiration et de relaxation.

Comment faites-vous pour amener l’élèves à collaborer, communiquer, développer des stratégies d’apprentissage, développer sa pensée créative, avoir une démarche réflexive ?

Effectivement l’importance des compétences transversales est indissociable d’un sportif. D’autant plus qu’il faut actuellement apporter ces compétences aux élèves également pour les aider en classe (au niveau concentration par exemple).

Voici quelques pistes :

Collaborer : un grand thème des sports collectifs, le Tchoukball s’y prête bien. La configuration de ce jeu d’équipe oblige les élèves a « utiliser » leurs camarades pour faire une passe, déjouer la défense adverse et c’est que en travaillant en équipe que cela est possible. Dans les exercices concrets, je fais changer le plus possible de partenaire de jeux dans un exercice de passe à 2 par exemple. Je mixe aussi les équipes très fréquemment ce qui crée dans la classe un « je peux jouer avec tous le monde car je l’ai effectué à l’entraînement ». Après il ne faut pas se leurrer, il y aura toujours des duos de petit sportif « d’élite » qui vont se trouver et mener le jeu. Mais ceux-là il faut les utiliser pour faire progresser les autres et à ce moment-là les prendre comme aide (dans ce cas-là ne pas oublier de les nourrir aussi avec des petites techniques spéciales pour eux).

Communiquer : en restant dans les sport collectif la communication est super importante. Je fais donc avec eux des exercices de déplacements et de passes. Un appel est décidé entre les 2 ou 3 élèves qui travaillent ensemble, par exemple « j’ai », « ici »,… et la passe s’effectue. Il ne faut pas négliger la communication visuelle : ne pas faire la passe si l’élève ne regarde pas et enfin la communication corporelle : une position adéquate pour réceptionner le ballon.

Développer des stratégie d’apprentissage : en sport la répétition en est une, peut-être pas la plus efficace, mais elle est utilisée (sachant que chaque mouvement est unique cette technique a ses limites). Pour faire un bon mouvement on va passer par différents exercices préparatoires. Si on prend l’exemple du plongeon, on ne va pas placer un élève sur le plot et lui dire « mets tes mains devant et saute ». On va devoir passer par le travail de la glissée ventrale, puis lui apprendre la bonne position, puis essayer depuis le bord en position assise, etc… On veut donc faire passer les élèves par différentes étapes avant le mouvement voulu. Un autre exemple, lors de l’apprentissage des règles de jeu, il va falloir utiliser différentes manières pour que les élèves les intègrent : la lecture, à l’oral, en démonstration par le maître d’éducation physique ou en jeu. Il ne faut pas oublier que chaque élève apprend différemment, il va donc falloir varier les techniques pour que tout le monde puisse jouer la forme finale pendant un match.

Développer sa pensée créatrice : pour ce thème et sans tomber dans les clichés, j’utilise la corde-à-sauter et la musique. Je leur demande de créer par groupe de trois une chorégraphie de sauts. Ils doivent choisir 3 à 6 styles dans une palette de 12 styles de sauts imposés et un nombre de saut également imposé. Ils choisissent leur musique et après montrent à la classe ce qu’ils ont préparés.

Avoir une démarche réflexive : pour générer de la réflexion chez les élèves il faut saisir les moments ou cela n’a pas marché durant une passe, un lancé, une roulade et faire comprendre par une démonstration sur le terrain les possibilités qui s’offrent à lui.

Comment différenciez-vous l’enseignement durant une séance ?

En sport, la différenciation est multiple et dépend beaucoup de l’activité pratiquée. On peut jouer sur les distances, le placement, le rôle de chaque élève sur le terrain ou encore les installations qui vont permettre à l’élève d’atteindre l’objectif voulu.

Je cherche avant tout à diversifier les exercices afin de faire en sorte que chacun obtienne de la réussite, car ce que j’ai observé avec certains élèves c’est qu’ils ne sont pas forcément capable de faire les mêmes exercices que les autres et que cela les décourage énormément. Dans les évaluations également je tente de tenir compte des problèmes qu’ils peuvent rencontrer dans l’apprentissage du mouvement. Certains dysfonctionnement sont encore bien méconnus et nous n’avons pas de moyen, ni de formation sur ces différentes pathologies.

Etes-vous toujours informé par l’enseignant titulaire du dossier scolaire de l’élève ayant des difficultés ?

Nous ne sommes pas du tout informés d’office sur les possibles troubles que peuvent avoir nos élèves. C’est en discutant avec les enseignants que nous pouvons avoir des informations pour autant que les parents veuillent communiquer à l’école ce dont souffre leur enfant.

Quels conseils pourriez-vous donner à un jeune maître d’éducation physique ?

Au début de notre carrière, nous arrivons avec un très bon bagage sportif, mais nous avons tout à créer. Je conseillerais tout d’abord de construire des cours bien cadré, avec des exercices ciblés pour les différentes activités. Avec une bonne base de leçons écrites cela donne à l’enseignant « débutant » un support et diminue le stress de « mon exercice marche pas que puis-je faire d’autre ?!». L’anticipation dans les cours est très importante au début. Ensuite avec l’expérience on peut petit-à-petit se détacher de l’écrit. Je conseillerais aussi de changer régulièrement ses cours, innover, trouver des nouvelles choses, cela évite une certaine routine ennuyante et démotivante. Par contre, ne pas négliger les routines pour les élèves, cela les rassure et permet de mettre un cadre en salle de sport propice à un bon apprentissage. Je vous souhaite plein de belles leçons dans ce métier qui certes peux s’avérer difficile, mais faire du sport avec les jeunes quoi de plus beau !