post-thumb

Six excellents antidotes

contre les six poisons de l’école

Dans un texte qui titrait « Rêve d’école – École de rêve »
J’avais raconté un rêve que j’avais réellement fait et qui me semblait riche de signification.

Le temps passant, je ressens l’envie d’approfondir le sujet pour celles et ceux qui souhaiteraient en savoir plus sur « les antidotes » proposés à ce que j’appelais les six poisons de l’école.

Premier antidote : « Les méthodes actives ».
Il s’agissait donc de remplacer la transmission des connaissances par les méthodes actives, qui elles, permettent la « construction » des savoirs.
Les méthodes actives que j’ai eu la chance et le plaisir d’appliquer pendant plus de 30 ans en tant qu’enseignant, peuvent n’être qu’une appellation pour des non professionnels de l’éducation, pour des parents aussi et dont on peut se faire une représentation un peu vague, floue, approximative, souvent accompagnée d’idées reçues.
Il existe une animation signée Syn Lab, que j’avais découverte sur Internet qui me semble présenter ces méthodes de façon simple, compréhensible par tous, permettant de mieux comprendre de quoi il s’agit.

Second antidote : « La pédagogie de projets ».
En effet, les « programmes scolaires » contraignent les enseignants et les poussent à découper les apprentissages en « rondelles de saucisson » avec lesquelles on gave bien souvent les élèves à contretemps (ils n’ont aucune envie de traiter ce sujet à ce moment),
à contrecœur (ça ne les intéresse absolument pas), de façon contre-productive (ce qui leur est présenté aurait pu les intéresser, voire les passionner dans un autre contexte à un autre moment).

On n’a plus besoin de prouver aujourd’hui que la pédagogie de projets – bien comprise et bien gérée – permet d’atteindre des niveaux de compétence plus élevés que la pédagogie dite traditionnelle et s’accompagne du plaisir d’apprendre. De plus, elle développe des outils et des capacités relationnelles qui seront de plus en plus indispensables tout au long de la vie de l’apprenant.

La pédagogie de projets est « une méthode d’enseignement dans laquelle les étudiants acquièrent des connaissances et des compétences en travaillant pendant une période prolongée pour enquêter et répondre à une question, un problème ou à un défi authentique, engageant et complexe »
De surcroît, la pédagogie de projets apporte de l’authenticité à la classe dans le sens où le problème est facilement connecté au monde extérieur et les étudiants sont mis au défi de collaborer, de communiquer et de penser de manière critique lorsqu’ils abordent le problème. Ces compétences sont directement liées aux compétences globales (ensemble général de comportements, d’habiletés et de connaissances qui peuvent être interdépendants et interdisciplinaires) et aux compétences transférables (compétences spécifiques attachées à une situation professionnelle donnée, mais qui peuvent être mises en œuvre dans un autre contexte professionnel.) https://www.bienenseigner.com/la-pedagogie-de-projet

Troisième antidote : « Une évaluation formative ».

Si les notes vous semblent la seule façon efficace d’évaluer la qualité d’un travail accompli, posez-vous sincèrement ces quelques questions :

Est-ce qu’une note indique ce qui n’a pas été compris ou ce qui est suffisant ?
Est-ce qu’une mauvaise note encourage l’élève à travailler plus, à apprendre plus ?
Qu’est-ce que veut dire « formative » dans l’expression « évaluation formative » ?
Est-il important de réfléchir au travail qu’on a réalisé, de repérer ce qui a fonctionné ou non et de chercher les moyens de s’améliorer ?

Dans un tout autre domaine … mais qui illustre bien le propos :
Si vous êtes malade et que votre médecin ne prend que votre température (36.5) Qu’il ne prend pas votre tension, ne vous ausculte pas et ne vous pose aucune question… puis vous dit que vous êtes en parfaite santé puisque vous avez 36.5 de température, alors que vous sentez que quelque chose ne va pas bien du tout, n’aurez-vous pas envie de consulter un autre médecin, voire d’en changer immédiatement ?

Voici une petite vidéo de l’APEL « entrée en matière » sur ce thème. Elle devrait vous donner envie de creuser le sujet… Sachez qu’il existe de nombreuses démarches qui ont largement fait leurs preuves, dans le domaine des évaluations sans notes.

Quatrième antidote : « Les défis »
Nous sommes nombreux à penser que la compétition permet de se dépasser, d’obtenir le meilleur de chacun et que cela la justifie totalement.
Et s’il existait des moyens tout aussi efficaces pour « se dépasser » sans souffrir des nombreuses dimensions pernicieuses de la compétition ?

Que penser de la compétition ? (Albert Jacquard – Polytechnicien – généticien…)

Quels sont les avantages d’une pédagogie de défis ?
Alors que la compétition consiste essentiellement à être le premier, à dépasser l’autre, le défi qui peut être individuel ou collectif, consiste à atteindre un but précis, si ambitieux soit-il, sans chercher à dépasser, battre, éliminer quiconque. Il donne tout son sens (éthique) à l’effort.

Cinquième antidote : « Le conseil de classe/d’école »
Après Janus Korczak (Le tribunal des enfants), Fernand Oury (pédagogie institutionnelle), un grand nombre d’expériences ont intégré cette dimension à leur projet sous différentes formes, sous différents noms (Ecole démocratique, dynamique, Sudburry Valley school et la plupart des écoles actives…)
Il s’agit tout simplement de faire participer directement les élèves à la construction des règles de vie de la communauté et aux processus de régulation (Lois, règlements, obligations, interdictions -> sanctions ou/et remèdes).

Quels que soient le nom et la forme donnée à cette « institution dans l’école », les bénéfices sont extraordinaires.

On respecte mieux des règles, consignes… que l’on a participé à mettre en place.
(Cela donne du sens au règlement et développe une attitude « citoyenne).

Le cahier/la boîte dans laquelle on inscrit ce que l’on souhaite traiter lors du prochain conseil peuvent aussi bien contenir des plaintes, des griefs, que des projets, des propositions positives.

Le simple fait qu’il existe un lieu et un moment précis où les problèmes de règlements, de discipline, les questions, les propositions vont être traités collectivement et prochainement, permet de continuer à travailler même si, une préoccupation, une difficulté, un conflit… apparaissent. (Énorme gain de temps quand on sait le temps passé à régler - souvent moins bien - des problèmes « à chaud » et la frustration qu’un élève peut ressentir lors qu’il pense que ses préoccupations ne sont pas prises en compte).

Souvent ce qui apparaissait comme un problème grave à chaud, sur le moment, a perdu de son importance au moment du conseil de classe, voire n’existe plus.

La parole de l’élève est prise au sérieux. Il sait qu’on se préoccupe de son bien-être.

Sixième antidote : « La pratique de la philosophie »

Depuis quelques années « la pratique de la philosophie » a trouvé sa place dans bien des écoles et le phénomène s’amplifie de jour en jour. Les « leçons de morale » dont l’inefficacité n’est plus à prouver ni l’ennui qu’elles procurent aux élèves ont, elles, bien heureusement disparu.

On sait qu’il n’y a pas beaucoup de moments ou de lieux à l’école où la parole de l’élève est véritablement écoutée.
Avez-vous déjà pensé à faire le calcul suivant : dans un cours de 45 minutes, l’enseignant parle au moins 25 minutes (minimum) s’il y a 25 élèves dans la classe chaque élève a donc 48 secondes de prise de parole à disposition !

Le moment de pratique de la philo, c’est le seul moment dans la semaine où je peux dire ce que je pense, ou poser des questions qui me préoccupent… et même à la maison ça n’arrive pas ou presque jamais ! (Témoignage d’une élève de 11 ans).

On sait que dès le plus jeune âge, les enfants se posent des questions sérieuses (autour de la mort, du sens de la vie, du bonheur, de l’amitié, de l’amour, de l’honnêteté…) et on sait aussi qu’il est de la mission de l’école de construire une capacité à s’exprimer clairement, à organiser sa pensée, à développer l’esprit critique et le discernement, à développer des outils à penser.

La pratique de la philosophie développe des outils à penser par soi-même et pour soi-même.

La valeur de cet outil pédagogique et éducatif est pour moi immense. Il devrait figurer dans tous les programmes scolaires.

Jean-Claude Brès